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Moi, mon 160 cm, ma guitare et mes divagations.
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14 juillet 2008

"Mary ne réagit pas. Elle avait collé son

"Mary ne réagit pas. Elle avait collé son front contre le carreau. Philip laissa filer l'ascenseur vers un autre étage, s'approcha à son tour de la vitre et se tint à côté d'elle. Maintenant son regard penché vers la rue elle glissa sa main dans la sienne.
- Bonne année, dit-elle.
- Il y déjà une demi-heure qu'on se l'est souhaitée!
- Je ne parle pas de celle-là. C'est presque à cette même heure que tu m'as retrouvée au dernier réveillon, nous nagions dans la foule en bas au lieu d'être ici, c'est à peu près la seule différence. Enfin je ne peux pas me plaindre, nous nous sommes quand même élevés de trente-trois étages depuis!
- Qu'est-ce que tu cherches à dire?
- Philip, cela fait un an que nous dînons ensemble trois fois par semaine, un an que tu me racontes tes histoires et moi les miennes, quatre saisons que nous sillonnons les rues de SoHo, du Village, de NoHo, nous sommes même allés jusqu'à TriBeCa un dimanche. Nous avons dû user tous les bancs de Washington Square, tester presque tous les brunchs du bas de la ville, trinquer dans tous les bars, et à chaque fin de soirée tu me raccompagnes chez moi, avec ce sourire gêné que tu m'abandonnes pour la nuit. Et chaque fois que ta silhouette disparaît au coin de la rue j'ai le ventre qui se serre. Je crois que je connais bien le chemin maintenant et que tu peux me laisser rentrer seule.
- Tu ne veux plus que l'on se voie?
- Philip, j'ai des sentiments pour toi, c'est pathétique que tu l'ignores! Quand vas-tu cesser de ne penser qu'à toi? C'était à toi de mettre un terme à notre relation si elle n'en est pas une, tu ne peux pas être aveugle à ce point-là!
- Je t'ai fait du mal?
Mary inspira à pleins poumons, levant la tête vers le plafond, elle soupira doucement.
- Non, c'est maintenant que tu m'en fais, rappelle-moi ce putain d'ascenseur s'il te plaît!
Désemparé, il s'exécuta et les portes s'ouvrirent aussitôt.
- Merci Seigneur, soupira-t-elle, j'étais presque à court d'oxygène!
Elle s'engouffra dans la cabine, Philip bloquait la fermeture des portes, ne sachant que dire.
- Laisse-moi partir Philip, quand tu es crétin je t'adore, mais là ta bêtise devient cruelle.
Elle le repoussa en arrière et les portes se refermèrent.

Philip, un bouquet à la main, appuya sur le bouton de l'interphone. Il attendit quelques secondes, la gâche grésilla. Etonné, il gravit les trois étages de la cage d'escalier délabrée. Le plancher craquait sous ses pieds. Quand il sonna, la vieille porte bleue s'ouvrit aussitôt.
- Tu attendais quelqu'un?
- Non, pourquoi?
- Tu n'as même pas demandé qui c'était quand j'ai sonné en bas.
- Personne ne sonne aussi brièvement que toi à New York!
- Tu avais raison!
- De quoi me parles-tu?
- De ce que tu m'as dit l'autre jour, c'est vrai que je suis un con. Tu es une femme généreuse, brillante, drôle, jolie, tu me rends heureux et moi je suis aveugle et sourd.
- Je n'en ai rien à faire de tes compliments Philip!
- Ce que je veux te dire, c'est que de ne pas te parler m'a rendu dingue, ne pas dîner avec toi m'a coupé l'appétit et je regarde mon téléphone comme un imbécile depuis quinze jours.
- Parce que tu es un imbécile!
Il allait rétorquer quand elle l'interrompit, posa sa bouche sur la sienne, et fit glisser sa langue entre ses lèvres. Il abandonna les roses sur le palier pour l'enlacer et fut happé à l'intérieur du petit appartement.
Bien plus tard dans la nuit, la main de Mary se faufila par la porte entrebâillée et saisit le bouquet abandonné sur le paillasson."


Où es-tu? de Marc Levy

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